Richard Benton was in Terre&Nature – April 28, 2016

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RECHERCHE VERTE

La drosophile a fin nez et son odorat fait mouche

À l’Université de Lausanne, l’équipe
du professeur Richard Benton cherche à décrypter le système olfactif de la drosophile, domaine de recherche prometteur.

Face à une armada de moucherons fai-sant bombance autour d’une corbeille de fruits, on n’a généralement qu’une envie: s’en débarrasser au plus vite. Richard Benton, lui, en élève des millions dans son laboratoire du Centre intégratif de géno-mique, à l’Université de Lausanne. Avec son équipe d’une dizaine de chercheurs, ce doc-teur en biologie tente de percer les mystères de l’odorat de Drosophila melanogaster, plus communément appelée mouche du vinaigre.

«Notre objectif est de comprendre comment les odeurs se transmettent aux récepteurs puis aux neurones et quelles réactions elles génèrent chez l’insecte, en termes de détec-tion de phéromones, d’attirance sexuelle, de recherche de nourriture ou de reconnais-sance d’un prédateur, par exemple», ex-plique le professeur Richard Benton.
Pour ce faire, les chercheurs procèdent à des mutations génétiques de la drosophile afin de rendre les neurones plus ou moins sen-sibles à un type d’odeur puis observent dans quelle mesure cela modifie le comportement de la mouche. À l’aide de microscopes puis-sants, des électrodes sont placées dans le nez de la drosophile, permettant ainsi de mesurer l’activité des neurones olfactifs. Les moucherons ne mesurant guère plus de 2 à 3 millimètres, on imagine la minutie avec laquelle il s’agit de les manipuler.
Or aussi minuscule soit l’échelle à laquelle ils travaillent, les scientifiques n’en nour-rissent pas moins de grands espoirs quant aux applications de ces travaux. «Dans notre laboratoire, nous faisons de la re-cherche fondamentale. Mais les résultats de nos analyses pourraient notamment ser-vir à mettre au point des pièges ou des ré-pulsifs plus efficaces contre la drosophile suzukii, cousine de la melanogaster, qui s’at-taque au raisin ou aux petits fruits mûrs et qui, depuis quelques années, cause bien des soucis aux vignerons et aux producteurs», relève Richard Benton. Sans parler de pos-sibles développements visant à neutraliser d’autres cousins nuisibles comme les moustiques, vecteurs du paludisme ou du virus zika. «Et puis, même si les circuits neuronaux de la drosophile sont moins complexes que les nôtres, leur fonctionne-ment est très sophistiqué. Mieux le connaître pourrait permettre de décrypter certains mécanismes du cerveau humain, qui reste une terra incognita de la science!»

Céline Prior –

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