24Heures on M.Tafti’s research

Une découverte explique les somnolences des malades
NARCOLEPSIE: Des chercheurs de Lausanne et de Genève confirment que cette maladie du sommeil est auto-immune.

Non, ce n’est pas seulement la fatigue ou une mauvaise nuit qui explique que l’on soit bien, ou mal, réveillé. La présence en suffisance, dans le cerveau, de l’hypocrétine, un neurotransmetteur de l’éveil, joue également un rôle crucial.
C’est précisément l’absence de cette substance – produite par certains neurones situés dans une partie précise du cerveau – qui est à l’origine de la narcolepsie. Cette maladie du sommeil, qui touche près de 4000 personnes en Suisse (0,05% de la population), provoque des attaques de somnolence avec endormissement et une perte de tonus musculaire, comme une brève paralysie qui se produit à la suite d’émotions (cataplexie).

Collaboration lémanique
«Il s’agit d’une maladie rare mais très invalidante. Les attaques de sommeil surviennent en pleine activité, dans des situations où on ne s’endort pas normalement, par exemple au milieu d’une discussion ou arrêté devant un feu rouge», explique le professeur Mehdi Tafti. Ce spécialiste mondial de la narcolepsie, chercheur au Centre intégratif de génomique de l’UNIL et codirecteur du Centre du sommeil du CHUV, vient de faire une découverte majeure. Les docteurs Vesna Cvetkovic et Laurence Bayer, deux chercheurs de l’équipe du professeur Michel Mühlethaler, du Département des neurosciences fondamentales de l’UNIGE, cosignent la recherche. En mettant en évidence, d’une part, la protéine Trib2 dans les neurones produisant l’hypocrétine d’une souris transgénique, d’autre part, la présence d’anticorps anti-Trib2 chez les patients malades, le professeur Tafti a pu confirmer que la narcolepsie est bien une maladie auto-immune (c’est-à-dire qui résulte d’un dysfonctionnement du système immunitaire). Le professeur Tafti en avait certes émis l’hypothèse en 2003 mais sans en avoir la preuve. En effet, toutes les personnes atteintes de narcolepsie sont porteuses d’un gène spécifique des maladies auto-immunes (présent aussi dans la sclérose en plaques). A noter que ce gène apparaît aussi chez 20% de la population, mais sans que celle-ci soit malade. Fort de son hypothèse, le professeur Tafti avait préconisé de traiter certains patients en leur donnant des immunoglobulines (médicaments utilisés pour d’autres maladies auto-immunes). Ce fut un succès. Cette fois, les chercheurs ont analysé le sang de 120 malades européens et découvert qu’il contenait, dans 30 à 40% des cas, des anticorps anti-Trib2. La protéine Trib2, en provoquant des anticorps, est donc à l’origine de la destruction des neurones de l’éveil.

Traitements
Les travaux publiés ces jours sur le site internet du Journal of Clinical Investigation ouvrent la voie à de nouveaux traitements. «Mais nous devons d’abord savoir pourquoi certains malades ne présentaient pas ces anticorps », affirme le professeur Tafti. Actuellement les narcoleptiques sont notamment soignés avec un stimulant (voire aussi un somnifère la nuit s’ils ont des insomnies). Un médicament à base de GHB (substance connue comme la drogue du violeur) permet de traiter à la fois les somnolences et les paralysies musculaires.

Francine Brunschwig

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